Une rencontre inattendue (à l'intention d'Ayla Vendell ONLY)

Doucement, son amant avait ouvert les yeux. Il s'éveillait à sa nouvelle vie, découvrant les avantages offerts aux vampires. Sa vision, sou ouïe et sa perception de l'environnement ne seraient plus jamais les mêmes. Il avait acquérit en mourant une rapidité hors du commun, il se déplacerait à une vitesse telle qu'il pourrait être quasi invisible aux yeux des humains. Cependant, l'état de vampire nécessitait un certain apprentissage, il lui faudrait du temps pour profiter pleinement de toutes ses nouvelles capacités.

Les larmes qui coulaient le long de ses joues formaient des sillons argentés qui étonnaient Ayla, même si elle n'en laissait rien paraître. La sensibilité exacerbée de David s'atténuerait peut être avec le temps, grâce à sa condition de vampire, mais rien n'était moins sur. Son amante était en mesure de comprendre que son passé l'ai rendu émotif, à présent qu'elle avait vu tous ses souvenirs. La vampirisation demandait une certaine concentration et l'avait absorbée, mais elle avait néanmoins prêté une assez grande attention à l'esprit du jeune homme et à ce qu'il se remémorait. La douleur d'avoir une mère tyrannique rejoignait sensiblement celle de ne pas en avoir. Malgré tout, il avait été choyé après son « accident », entouré d'affection, certes exagérée et surprenante, mais quelqu'un l'avait rassuré et protégé. Ce n'était pas le cas d' Ayla, qui en voulait toujours terriblement à sa mère naturelle. Auparavant elle avait caressé l'espoir de la retrouver pour la faire souffrir autant qu'elle même avait souffert, mais à présent elle n'était plus qu'indifférente. Depuis sa mort, la vampire avait tué suffisamment pour calmer sa haine et faire taire sa rancoeur. Qui pourtant ressurgissait de temps à autre, lorsqu'elle manquait de sang ou de divers produits interdits capable de la calmer. Elle n'était pas franchement ce qu'on pouvait appeler une personne stable, mais peu de gens la connaissait suffisamment longtemps pour pouvoir s'en apercevoir. Avec David ce serait différent... Enfin elle l'espérait.

Certains souvenirs l'avaient interpellés. La rencontre de Lestat, malgré qu'elle ait déjà vu cette intervention la veille lorsqu'elle avait pénétré l'esprit de son cher et tendre. A présent elle avait découvert son enfance, son ressenti par rapport à sa mère, sa solitude et le plaisir qu'il en tirait... Elle fut surprise de voir que le jeune homme s'était lui aussi approché de substances illicites, même si elle, a contrario, n'avait pas fait que s'en approcher. Une image s'imposa à elle, comme elle s'imposait au mourant au moment crucial. L'idée d'un bain brûlant recouvert de pétales de roses à la douce lumière de bougies multicolores la séduit particulièrement, et elle se promit de partager un tel moment avec son infant. Il n'avait pas eu accès aux propres souvenirs d'Ayla, alors que sa mort lui était notamment revenue en mémoire. Dans un moment pareil, c'était tout à fait normal. C'était la toute première fois qu'elle accordait le Don Obscur, et jamais elle n'aurait pensé que ce fut un acte si intense pour elle aussi. Elle était épuisée, malgré qu'elle se soit nourrie après avoir donné la majeure partie de son sang a David. Une grande lassitude s'emparait doucement d'elle, mais avant de s'accorder du repos elle devait aider son amant à parachever sa transformation. Tout d'abord il fallait qu'il apprenne les recommandations d'usage.

Laissant le jeune homme s'amuser avec une mèche de ses cheveux, elle lui caressait doucement la joue. Elle percevait dans son regard qu'il ne voyait plus les choses de la même façon, et qu'il était encore émerveillé de sa vampirisation. Lui aussi était fatigué bien qu'il ne s'en rende probablement pas compte, simplement heureux de ce qui venait de se passer. Mais son corps ne tarderait pas à le rappeler à l'ordre, et une longue journée de sommeil serait absolument nécessaire au repos du récent vampire. D'ailleurs la nuit avançait dangereusement, il était temps. Touchée par les paroles de David, Ayla sourit tendrement et l'embrassa d'une façon telle qu'il n'avait jamais été embrassé. Sa voix douce et grave s'éleva dans le silence de la pièce.

_ Comme tu vas rapidement le constater, ton état de vampire te confère plus de pouvoirs qu'un simple mortel... Ainsi qu'une perception tout à fait nouvelle des choses.

Pour appuyer ses dires, elle lui caressa le cou, le torse et le ventre, si légèrement qu'une caresse d'une plume ou d'un souffle de vent aurait pu paraître brusque et lourde en comparaison. Les frissons qui parcouraient la peau de son amant trahissaient sa sensibilité et l'effet de ces effleurements. Poursuivant d'une voix plus suave encore, elle lui précisa quelles recommandations il devrait suivre pour sa propre sécurité.

_ Les vampires ont beaucoup d'avantages sur les humains, mais en aucun cas n'oublie que tu ne dois jamais, au grand jamais t'exposer aux rayons du soleil. Nous sommes immortels dans la nuit, au jour nous ne sommes que de pauvres pantins réduits en cendres en moins de temps qu'il ne faut pour le dire.

Soupirant, elle s'interrompit pour embrasser David. La tentation était trop grande et elle avait uniquement envie de profiter de la nuit, du lit sur lequel ils étaient étendus et de l'amour qu'ils se vouaient. Cependant le temps passait, il fallait que son amant s'abreuve encore. Certaine, malgré qu'elle ne le connaisse pas encore très bien, que ce qu'elle allait lui dire n'allait pas spécialement l'enchanter, elle murmura :

_ Il est également nécessaire, je dirais même indispensable et vital, de te nourrir. Il te faudra tuer des humains pour subvenir à tes besoins. Tu n'as pas d'autre choix... Boire le sang d'un être déjà mort serait fatal, et tu quitterais cette ville, cette vie à tout jamais dans la souffrance.

La belle vampire se redressa et prit les mains du jeune homme pour l'entraîner. La jeune proie qu'elle avait ramenée de longues minutes plus tôt commençait à se réveiller, elle gémissait doucement et n'allait pas tarder à revenir complètement à elle. Il était temps, mais serait-il prêt... Il n'avait pas le choix. Sa survie en dépendait, et au delà de cet aspect pratique c'était un passage essentiel de la naissance d'un être de la nuit. Les souvenirs de sa première victime, la sensation exquise de sentir le coeur de sa proie ralentir et s'arrêter, le goût si délicat du sang, du premier sang... Tout cela lui revenait à l'esprit, et elle sourit mystérieusement.

_ Mon Amour, ta transformation n'est pas tout à fait achevée... Cette jeune femme attend, elle T'attends... Afin de compléter ton métabolisme de vampire, il faut que tu la tues. Que tu absorbes l'intégralité de son sang, pour satisfaire ta soif, qui si tu ne la perçoit pas encore, se fera très bientôt sentir. Mais surtout, arrêtes toi avant que le coeur de ta victime ait cessé de battre. Ton instinct... te guidera dans cette démarche.

Tout en prononçant ces mots, elle posa sa main droite sur le torse de son amant, plus précisément juste à l'endroit de son coeur. Lui va te guider... Tu sauras ce que tu as à faire, et tu pourras commettre ce meurtre... Elle le lâcha et se leva pour aller chercher le corps inerte qui reposait dans un coin de la pièce. Soulevant la jeune fille sans aucun effort, elle la déposa sur le lit à côté de David. Dans un geste de tendresse elle remit en place les cheveux de sa proie, de longs cheveux bruns mordorés qui encadraient parfaitement son visage de poupée. Malgré cela elle n'éprouvait pas la moindre once de pitié pour cette enfant, elle la connaissait de vue et elle passait son temps a traîner les trottoirs, ayant fugué de chez ses parents. La tuer n'était qu'un service à lui rendre, et sa mort en rendait un autre. Levant les yeux sur ceux de son amour, elle remarqua une lueur d'hésitation. Malgré elle, un fin sourire s'étira sur ses lèvres pâles. Il lui semblant tellement normal de s'emparer de la vie de quelqu'un à présent, de tuer pour survivre, comme si elle avait droit de vie ou de mort sur tous ceux qu'elle rencontrait. C'était presque la cas, il suffisait d'être au mauvais endroit au mauvais moment.

En y réfléchissant, elle songea que le meurtre ne lui avait pratiquement jamais posé de problèmes. Au début de sa vie de vampire, elle s'amusait à tuer, trop désespérée d'une part et trop heureuse de pouvoir enfin donner suite à sa haine générale. Puis au bout de semaines, elle s'était lassée de ces crimes. Pire encore, elle se battait avec des certitudes, et encore plus avec des incertitudes qui la hantaient. Elle ne s'intéressait pas à ses victimes, tuant à tort et a travers, sous le coup de la colère ou simplement pour s'amuser. Durant cette période elle était prise de brusques sentiments de remords, se haïssant pour ce qu'elle était devenue, pour sa nature profonde d'incarnation du mal. Elle cherchait sa propre identité, sa place dans ce monde où logiquement, elle n'avait rien à faire. Elle avait alors trouvé une sorte d'échappatoire à cette nécessité de boire du sang. La jeune femme s'était réfugiée dans la drogue, toutes les substances illicites ou presque y passant.

Secouant la tête, elle songea au moment présent. En plus des sombres souvenirs de ce passage de sa vie de vampire, elle conservait de multiples cicatrices, la majorité datant d'avant sa mort, mais quelques unes qui était restées malgré sa faculté de guérison. Notamment les marques de piqûres, les seringues ayant été ses plus proches amies, avec les lames de rasoir. Plus tard elle s'était calmée, adoptant une philosophie qui lui permettait de tuer sans regrets cette fois. Elle s'était plus ou moins trouvée, acceptant sa condition et en tirant profit au maximum. Au fond d'elle même elle redoutait l'instant ou David choisirait de tuer, ou non, sa première victime. Soupirant, elle prit les mains de son amant et un air à la fois mélancolique et et enthousiaste.

_ Tue-la... Elle est l'instrument du début de ta nouvelle Vie, sa mort déterminera la suite de ton existence...

Marquant une pause, elle eut un soudain besoin de tendresse, d'exprimer un amour qui longtemps avait été avorté. Sentiments enfouis et refoulés, premièrement par méconnaissance de l'Amour, l'amour en général : celui d'une mère, celui d'une famille, celui d'un compagnon (ou d'une compagne...), et ensuite par peur d'une souffrance infinie et épuisante, découverte lors des prémices de ses propres expériences. David... Il lui semblait si parfait, si adorable, si angélique... Un jeune homme avec un potentiel de séduction affolant, une possibilité d'aimer gigantesque, tout cela caché derrière des craintes paranoïaques datant de son enfance. Ayla, pour la première fois de sa vie, ressentant l'envie impérieuse de protéger cet Ange, démoniaque à présent, de le serrer dans ses bras, qu'il retrouve une certaine confiance, tout d'abord en elle, et surtout, en Lui-même...

désolée, je vais m'empresser de remédier à ce petit défaut ;-)
je ne peux me connecter très souvent, voire très rarement, d'où ma longue absence... merci pour l'info, à bientôt peut être...

A mesure qu'Ayla lui énumérait les nouvelles capacités dont il disposait, David put enfin se rassurer et trouver une réponse à ses questions. Ainsi, s'il était subitement devenu beaucoup plus précis dans sa vision des choses, s'il avait été envahi d'une sorte d'émotion indomptable qui le fit pleurer, et s'il ne pouvait s'empêcher de trouver Ayla encore plus radieuse et douce qu'auparavant, c'était donc parce que sa condition avait changé. Cette nouvelle vie, ou plutôt le début de sa non vie, s'annonçait pour le moins grisante. Lui qui avait souhaité, depuis qu'il avait posé les yeux sur la belle, être toujours plus proche d'elle, il était comblé. Bien que ce mot était bien trop inférieur à la sensation de délectation qu'il éprouvait. C'était un peu comme si Ayla était sa mère, puisqu'elle partageait le même sang, comme si elle était là pour le protéger. Certes, elle le pourrait, de tout, de tout le monde mais jamais elle ne pourrait le protéger d'elle-même. Cette femme était, dans le bon sens du terme, une sorte d'envoûtement à elle seule. Une fois que l'on goûte à ses lèvres, il n'est plus jamais possible de s'en détacher, d'oublier l'effluve subtil qui émane de son cou, là où David aurait tant souhaité y planter ses canines. Juste pour ressentir encore la perfection liée à ce sentiment de ne faire qu'un. Elle et Lui, pour toujours. Ils étaient liés, et elle pourrait aller jusqu'à le renier, jusqu'à le haïr du plus profond de son cœur vampirique, il ne l'oublierait jamais, ne cesserait jamais de la trouver merveilleuse et de la respecter. Elle était si importante pour Lui... Il ne s'imaginait désormais plus devoir la quitter, aussi bien physiquement qu'amoureusement parlant. Ses sentiments étaient intenses, sincères, incorruptibles.

Lorsque sa main vint effleurer le cou, le torse et le ventre de David, il put évidemment percevoir sa récente sensibilité décuplée mais... Cette augmentation logique de sa réceptivité était certes due à sa transformation mais également au fait que la main qui avait délicatement parcouru son corps n'était pas quelconque ; c'était la Sienne, celle de la femme qu'il aimait plus que sa propre existence, celle pour qui il aurait été capable de tout. Du plus rationnel au plus aberrant, il suffisait qu'Elle lui demande, il obéirait. Non pas parce qu'il était subitement devenu assujetti, dominé, voire esclave d'Ayla mais tout simplement parce que son amour pour Elle lui guidait de réagir de cette façon. Lorsqu'elle aborda le danger que représentait le soleil, David fut d'une certaine manière soulagé de constater qu'il n'était pas totalement ignorant sur ce sujet :

_ Je sais, Princesse... Sinon pourquoi irais-tu te protéger durant toute la journée ? Je sais aussi que tu fais partie de celle qui abhorre le soleil et que tu préfères t'en préserver radicalement. Et je crois comprendre pourquoi...

Bientôt, elle lui expliqua également qu'il devrait se sustenter de sang. Ce liquide précieux qui l'avait fait passer du côté humain au côté sombre, ténébreux des créatures de la nuit. Celui qui, paradoxalement, lui avait arraché la vie, devrait bientôt lui être nécessaire pour survivre. David ne saisissait pas encore toutes les nuances qui touchaient de près la vampirisation : comment il était devenu comme Ayla, même s'il avait effectivement observé comment elle avait procédé, pourquoi il ne pouvait plus s'alimenter comme un être humain, était-il damné ? Une nouvelle série de questions tourbillonna dans sa tête mais il laissa parler Ayla qui, de toute évidence, finirait par répondre aux questions que David se posait, sans qu'il ait même besoin de les lui énoncer. Peut-être avait-il gagné en maturité, en patience, ou peut-être était-ce juste le plaisir d'écouter parler son Amour, il n'en savait rien...
Désormais, il devait passer une sorte de test peu ragoutant, peu rassurant aussi, et surtout assez pénible pour lui, dans le sens où cela faisait ressurgir des souvenirs saumâtres de sa jeune existence. Bien avant qu'il ne rencontre Ayla, bien avant qu'il ne tombe tellement amoureux d'elle, qu'il en vienne jusqu'à faire complètement abstraction desdits détails. Néanmoins, lorsqu'il posa son regard sur la jeune femme, il trouva qu'elle avait un air doux et attrayant. Son sang allait sûrement avoir un goût agréable puisqu'elle était dans la fleur de l'âge et qu'elle était en pleine possession de ses moyens, par conséquent, elle semblait être la victime parfaite... pour un premier meurtre ? Repas de survie ? David s'amusa à associer ces deux mots, qui lui avaient semblé être l'oxymore parfait. Comme si le retrait d'une vie pouvait lui permettre, à lui, de vivre...

David fut presque envoûté et rasséréné lorsqu'il entrevit le sourire si particulier d'Ayla, un sourire qui était à mi chemin entre le mystère dont elle était empreinte et le charme aguicheur qui lui était propre. Et bientôt, son cœur se serra dans sa poitrine, ce cœur qui théoriquement n'avait plus la même fonction vitale qu'auparavant, avait pour l'occasion véritablement eu ce réflexe de contraction. La douceur des paroles de sa compagne, le simple fait qu'elle l'appelle "Mon Amour", avait nettement plus de signification à présent, étant donné que David savait avec certitude à présent qu'Ayla était sincère. Sinon pour quelle raison aurait-elle perdu son temps à le vampiriser, surtout si elle était consciente que cela ne ferait que décupler l'amour qu'il ressentait pour Elle ? C'était donc finalement la lutte contre cette angoisse indicible, une sorte de dépassement de lui-même en quelque sorte, qui avait permis à David d'être pleinement heureux, d'atteindre ce que les humains appellent la félicité (seulement, c'eut été du blasphème pour un vampire d'utiliser ce mot sujet à controverse). La main de sa Princesse parcourut une nouvelle fois son torse, s'attardant sur l'organe vital au commun des mortels. Ce même cœur qu'elle lui interdit de faire cesser de battre complètement sur les femmes, les hommes qui allaient être ses futures, ses potentielles victimes. Sans quoi, il semblait que cela aurait pu être dangereux, ou tout simplement prohibé par la caste vampirique.

La jeune femme rapprocha la victime de David ; lequel était désormais en proie à une sorte d'anxiété, presque de peur de mal agir. Evidemment, son acte était mauvais, mais ce qu'il redoutait le plus, c'était simplement de ne pas "aimer" le goût du sang, de ne pas pouvoir s'en abreuver indéfiniment, puisque, apparemment, l'existence d'un vampire n'avait -quasiment- aucune limite. Maintenant qu'il était véritablement transformé, ou presque selon les dires d'Ayla, il doutait. Cela ne lui était pas apparu comme une évidence avant cet instant. Mais ses doutes furent bientôt dissipés ; il n'oublia pas qu'en face de lui se trouvait la femme la plus merveilleuse, la plus douce, la plus attentionné et aussi la plus énigmatique qui soit. Il s'inspira donc de sa compagne, il prit subitement conscience qu'il ne pouvait se permettre de la décevoir. Elle semblait nourrir tellement d'espoir en Lui. La dernière étape, l'ultime test, la véritable preuve de son amour était sur le point d'être mise à (rude) épreuve : reproduire le schéma qui l'avait longtemps traumatisé, imiter un acte qui avait changé complètement sa vie. Après le conseil (qui ressemblait plutôt à un "ordre") que lui donna Ayla, David sentit qu'il ne pouvait plus faire marche arrière. C'est pourquoi il se prépara à venir planter ses canines dans le cou délicat de la jeune victime. Il inspira profondément, allant même jusqu'à l'exagération, ferma les yeux, bascula la tête en arrière et finit par redresser le corps quasi inerte de la demoiselle. Sa tête, ainsi que sa nuque, étaient molles et cela ne facilita pas vraiment sa prise en main du corps de son futur repas. Néanmoins, il parvint à caler la tête de celle-ci sur son épaule. Il avança progressivement sa bouche de son cou et finit par entrouvrir doucement la bouche, de façon à ce qu'elle prenne la forme la plus en adéquation avec la veine saillante, qui s'avérait être l'infime porte qui séparait l'enveloppe corporelle avec la vie intime et traumatisante qu'il s'apprêtait à connaître mieux que quiconque en quelques minutes seulement. Au dernier moment, il releva la tête et fixa Ayla :

_ Je ne fais ça que pour Toi, Mon Amour...

Il mordit délicatement la jugulaire de la victime, puis constata que la peau ne cédait pas aussi bien qu'il l'avait imaginé alors il insista davantage. Enfin, il put sentir le mince filet de sang qui coulait jusqu'au fond de sa gorge. Son parfum envoûtant fit tourner la tête du vampire qui continua néanmoins à s’abreuver. Le goût du sang était étrange, ferreux et chaud… mais aussi terriblement bon. Il ne pouvait plus se détacher d’elle mais il était conscient qu’il devrait le faire avant que son cœur ne cesse de battre, comme l'avait indiqué Ayla. Les images qui envahissaient son esprit à présent n’étaient pas désagréables mais pas vraiment fidèles à ce qu’il avait imaginé. Ce n’était que luxure, abondance, ivresse, orgies en tout genre, des peaux se frôlant, une douce chaleur, un plaisir quasi palpable, de la dentelle à profusion, des postures lascives, des endroits glauques ou bien trop colorées, des voix féminines, des murmures masculins, des lèvres pulpeuses, des jeunes femmes plantureuses, des corps tout aussi aguicheurs les uns que les autres et puis une beauté à couper le souffle. Cette beauté n'était pas humaine ; la femme qui se trouvait à présent en face de lui possédait une chevelure flamboyante ondulée, des yeux émeraude et un regard perçant, profond, des formes légères et lascives, presque libertines. David prit conscience que cette femme n'était autre qu'Ayla et que la vision qu'il venait tout juste d'avoir était troublante de réalisme. Il eut donc un mouvement de recul et la vision d'évanouit pour laisser place à le visage satisfait de celle qu'il aimait.

_ Pourquoi... Ayla, pourquoi tu étais là ? Pourquoi tu m'es apparue ?

David se délesta du corps désormais inutile de celle qui lui avait permis de continuer à vivre en lui donnant le sang qui lui était pourtant si indispensable, vital. Il passa sa langue sur ses lèvres encore perlantes de sang et s'avança vers Ayla. Il avait à présent follement envie d'embrasser sa compagne, pour deux raisons essentielles : il l'aimait davantage encore, c'était un sentiment presque ineffable tant parce qu'il était supérieur aux limites qu'il s'était préalablement fixées que parce qu'il eut fallut qu'il créé un mot nouveau pour faire passer le plus clairement possible son message à son Amour ; il était évidemment fier, ravi, comblé à l'idée d'avoir réussi à surmonter sa peur puisque cela signifiait donc qu'il supporterait aisément sa nouvelle "vie" et qu'il pourrait profiter d'Ayla encore longtemps.

_ Ma Princesse, si tu savais comme je T'aime... Je ne Te remercierai jamais assez d'avoir été si présente, si rassurante, si parfaite. Tu as aussi été atrocement sadique, tu sais. Comment aurais-je pu Te résister, même une seule seconde ? Tu m'as attiré dans Ton monde mais avant que j'y parvienne, j'ai été longuement en proie aux doutes. Tout ceci me faisait atrocement peur... Mais c'était sans compter que je serais à Tes côtés.

Il s'arrêta une nouvelle fois, il n'avait pas l'impression d'en faire assez pour Elle mais peut-être aurait-Elle le sentiment que tout ceci était exagéré. Voilà qu'il se remettait à douter... Triste constatation pour Lui qui avait pensé que tout ceci prendrait fin lorsqu'il serait devenu vampire à part entière. A priori, les vampires sont tellement flegmatiques, tellement confiants, presque hautains, qu'il semblerait presque paradoxal de leur attribuer une "conscience", une part d'incertitude. Et pourtant, est-ce que ce qu'était en train d'éprouver David pouvait porter un autre nom ? Sinon celui de la peur de décevoir Ayla, encore et encore…

_ Je voudrais simplement que tu saches que je T'aime... Je ne vois pas ce qui pourrait nous séparer actuellement, je me sens épanoui comme jamais avec Toi. Tu es tout ce qu'il me faut, personne ne pourra jamais T'égaler. Je T'aime Ayla...